L’importance des conventions dans un projet d’archivage

Texte réalisé par Emilie Vermaut (Stagiaire), 
Véronique Fillieux (UCL) et
Virginien Horge (Ville de Mons)

La réalisation d’une convention est centrale lors de la collecte d’archives. Mais quel est son but ? Quelles en sont les spécificités ?

De manière générale, la convention permet d’encadrer la donation entre la personne versante et le centre d’archives. Il s’agit d’une réflexion à court et à long terme sur les documents d’archives versés, les modalités de conservation, de consultabilité, de valorisation des documents, etc.

Au vu de la multitude des types de dépôts possibles (don, versement, …), du type de document (témoignages oraux, archives numériques, etc.) et des finalités propres à chaque centre d’archives ou institution, il n’est pas facile de prévoir une convention unique valable dans tous les cas. Bien que le cadre des conventions connaisse des constantes, ces dernières prennent des formes multiples pour s’adapter à la spécificité du fonds, du producteur ou encore des modalités de conservation. La convention sera donc différente si elle porte sur une donation « classique », concerne une extraction d’un blog ou d’une page Facebook.

C’est pourquoi cet article introductif permet de montrer l’importance des conventions et pose un cadre général. Des exemples concrets seront par la suite mis à disposition sur la plate-forme.

1. Les enjeux d’une convention

Mettre en place une convention, c’est répondre à différents enjeux :

  • Le Règlement Général de Protection des Données (RGPD) doit être respecté. Il permet de protéger les personnes concernées par le traitement de leurs données à caractère personnel.
  • Les questions de droit à l’image et de propriété intellectuelle doivent elles aussi être réglées par la convention. Elles concernent tant la personne versante que les témoins ou autres personnes figurants sur et dans les archives. Ces questions doivent être traitées, dans la mesure du possible, en concertation avec la personne ou l’institution versante.
  • La problématique de la réutilisation est centrale et porte sur l’utilisation du document pour d’autres objectifs que la finalité initiale. Ces conditions sont en lien avec celles cadrant la conservation des documents. Une clause supplémentaire doit parfois aussi être reprise concernant le reconditionnement ou la restauration des documents. Les questions de reproduction doivent être discutées, les documents pouvant être reproduits à diverses fins (historique, patrimoniale, culturelle, pédagogique, informationnelle, scientifique) et ces possibilités doivent être indiquées dans la convention. En tout état de cause, les modalités de la convention doivent refléter tant la volonté du producteur que la politique et les missions du centre d’archives.
  • Les conditions de consultabilité des documents peuvent être soumises à des conditions spécifiques de la part du producteur : certains documents peuvent être placés temporairement sous embargo, d’autres peuvent nécessiter une autorisation spécifique. Une clause de la convention doit alors être ajoutée et prévoir le cadre légal de la consultabilité des documents avec p. ex. des possibilités de dérogations individuelles sur autorisation de la personne versante. Toutes ces clauses doivent être mises sur papier lors de la rédaction de la convention afin d’éviter de futures complications. Les formes de la consultation (sur place, en ligne…) doivent aussi être prévues et indiquées dans le corps de la convention.

2. Définition du cadre de la collecte

Il est impératif de définir le cadre et la finalité de la collecte dans la convention. L’institution de conservation doit faire preuve de transparence quant aux autres finalités potentielles. Le producteur doit savoir à quelles fins les documents seront utilisés (historiques, pédagogiques, culturelles, patrimoniales, etc.) et peut émettre certaines réserves ou souhaiter certaines modalités.

Le cadre de la collecte sera différent selon le mode de collecte. Des disparités sont en effet à noter selon que la collecte soit effectuée via une adresse mail, à l’aide d’un règlement général d’utilisation, sur le terrain ou encore lors de l’extraction d’une page Facebook. Ce qui témoigne de la nécessité et de l’intérêt d’une convention pouvant s’adapter aux contraintes et aux spécificités de chaque situation.

Il peut aussi arriver que le centre d’archives ne veuille ou ne puisse pas conserver la totalité des documents constitutifs du fonds ou de la collection. Il se réserve alors le droit de procéder à un tri parmi les documents et, le cas échéant, de transférer, de détruire certains des documents reçus, notamment les doublons, des documents sériels, des documents endommagés ou portant atteinte aux droits ou à la réputation d’une personne. Ces possibilités doivent aussi être réglées par la convention, laquelle parfois comporte aussi une clause relative aux conditions de transport des archives ou du transfert de fichiers.

3. Les points de vigilance lors de la création d’une convention

Lors de la réalisation d’une convention, différents points doivent être mis en avant tant pour rassurer le producteur que pour protéger juridiquement le centre d’archives.

  • La question des dommages pouvant survenir aux archives doit faire l’objet d’un article particulier dans la convention. Il permet au centre d’archives de ne pas être tenu responsable des dégradations que peuvent subir les archives (inondation, incendie, etc.) malgré toutes les précautions prises par le centre.
  • Dans la majorité des cas, la personne versante garde, au moins durant un certain temps, une partie des droits sur les documents qu’elle a produits. Il faut, ici, faire la différence entre la législation portant sur les droits personnels (RGPD) et celle encadrant les informations que le producteur d’archives fournit. Ce dernier peut à tout moment demander d’y avoir accès, de les rectifier, de les effacer ou encore d’en obtenir une copie. La personne versante peut demander le retrait de son consentement, ce qui implique la suppression des données à caractère personnel et/ou une anonymisation. Le retrait de certains documents des collections peut aussi être demandé. Une clause réglementant ces possibilités doit être envisagée afin de protéger les deux parties.
  • L’éventualité d’une fermeture du centre peut aussi être intégrée à la convention. Le producteur peut dans ce cas accepter le transfert des archives dans un centre aux missions similaires et avec une continuation des conditions de la convention ou le refuser et demander la restitution des archives.

4. Les points de vigilances lors de la création d’un règlement

Il est aussi possible de ne pas recourir à une convention et de se tourner vers un règlement général qui lui aussi doit être réfléchi. Ce type d’encadrement survient lorsque c’est le producteur qui vient vers le centre d’archives, comme dans le cadre d’une collecte spécifique, p. ex. par le biais d’une adresse mail centrale. Dans ce cas, l’adresse mail est soumise à un règlement général d’utilisation qui protège tant le producteur que le centre, à l’instar d’une convention. C’est par exemple ce que fait actuellement la ville de Mons avec le projet Mémoire de confinement.

Lors de la création d’un règlement, le focus doit être mis sur différents points :

  • La question des données à caractère personnel doit être régie par le règlement en prenant en compte les obligations dérivant du RGPD. L’utilisateur doit savoir quelles données seront utilisées (nom, adresse mail, …) et à quelles fins.
  • L’organisation et la présentation du projet doivent y être définies. Il faut donc expliquer la finalité destinée à ces archives. S’agit d’une conservation à long terme ? D’une conservation de données à des fins archivistiques ? Ou encore d’une utilisation historique ou scientifique des données recueillies ? Les données sont-elles recueillies dans le but de réaliser une publication future ?
  • Les droits et devoirs des utilisateurs doivent y être expliqués. Dans ce cas, l’utilisateur s’engage, entre autres, à ne pas envoyer de contenu commercial ou de propos haineux. Le centre d’archives lui, s’engage à garantir l’intégrité des documents envoyés. Il faut aussi expliquer les droits que les producteurs auront sur le travail a posteriori (anonymisation de certains contenus, droit de se rétracter, ….).
  • L’utilisateur doit aussi être au clair avec la notion de tri de ces documents. Il se peut que la totalité de son témoignage ne soit pas utilisée. Le producteur doit alors être mis au courant de cette possibilité. 
  • La justification des actions entreprises doit aussi prendre une part importante dans la réalisation d’un règlement. Toutes les actions doivent être expliquées aux utilisateurs. Il s’agit, ici, d’une forme de protection juridique pour le centre d’archives.

Conclusion et pour aller plus loin

De manière générale, il ne faut pas rompre le lien entre les archives et leur producteur et entendre les volontés de ce dernier. Un accès aux documents pour le producteur peut être mis en place tout en étant soumis à certaines conditions (par exemple : en salle de lecture, copies, reproduction, …). De plus, les pratiques peuvent être diverses selon le centre d’archives. La question des conventions est donc aussi complexe que centrale. Aussi, quelques exemples de cas plus pratiques seront mis à disposition afin de permettre une meilleure compréhension de cette réalité.

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